Ah, tu veux une plongée dans l'bon vieux temps des campements d'bûcherons? Dans ces années où les scies à chaîne étaient un rêve lointain, pis qu’on affûtait nos haches avec plus d’précision qu’un barbier avec son rasoir! C’tait l’époque où moi, p’tit gars, j’accompagnais mémère dans la cabane des bûcherons, pis où chaque journée commençait avec l’odeur du bois mouillé pis des feux de camp.
La Vie en Cabane de Bûcheron avec Mémère : Un Retour aux Racines
Quand j’étais jeune, passer du temps en cabane avec les gars du campement, c’était comme entrer dans un autre monde. Là-bas, dans la forêt profonde, chaque branche craquait sous la rosée, pis le matin, c’était l'odeur des feux qui réchauffaient l’air frette. J’m'en souviens comme si c’était hier : ma mémère, qui nous faisait des tartines de pain maison avec du sirop d’érable en guise de petit-déjeuner avant qu’on sorte travailler.
Elle était pas bûcheron, mémère, mais elle connaissait les bois comme si elle y était née. Pis elle avait une patience d'érable pour nous apprendre à vivre là-bas, entre les loups pis les pins. Avec elle, la cabane était un lieu vivant, une véritable maison qui résonnait des rires et des histoires.
Le Lever du Soleil et les Premiers Gestes de la Journée
À la cabane, la journée commençait toujours avant le lever du soleil. Vers cinq heures, même pas le temps de bailler, on entendait mémère remuer dans sa chambre. Elle se levait toujours la première, allumait le poêle à bois, pis l’odeur du café frais envahissait la cabane en moins d’temps qu’il n’en faut pour dire « bonjour ». C’tait du café fort, à vous réveiller un ours, mais fallait ça pour affronter la journée.
Moi, p’tit gars, j’essayais de suivre les grands. J’attrapais mes bottes encore trempées d’la veille, un chandail de laine fait main, pis on sortait dehors, encore un peu engourdis. Les gars, eux, prenaient leurs haches en main, inspectaient leurs lames, pis se retrouvaient autour d’une vieille meule en pierre. C’était l’temps d’affûter, de préparer nos outils pour la longue journée qui nous attendait. Affûter une hache, c’tait pas une mince affaire, mon chum.
L’Affûtage de la Hache : Un Art Ancestral
Pour affûter nos haches, on utilisait pas d’appareil sophistiqué. Non, non. On avait juste cette vieille pierre ronde, une meule qu’on tournait à la main. Les gars s’installaient autour, chacun leur tour, pour redonner du mordant à leur lame. Moi, j’étais trop jeune pour la vraie coupe, mais mémère m’avait montré comment tenir une hache, comment en sentir l’équilibre, pis elle m’avait appris que chaque coup, chaque entaille devait être précis.
Un bon coup de hache, c’est comme un bon coup de pinceau, qu’elle disait. Si t’appuies trop, tu risques de fendre n’importe comment, pis si t’es pas assez précis, ça fait un travail bâclé. La lame devait être aussi affilée qu’une dent de loup, pis fallait y aller en douceur, avec le pouce qui sentait si le fil de la hache accrochait encore ou s’il coupait net.
Avec la meule qui grinçait pis nos mains pleines de résine, on savait qu’on touchait là à l’art du bûcheron. Les gars prenaient ça au sérieux, parce qu’une hache mal aiguisée, c’est pas juste une perte de temps, c’est aussi un danger pour soi pis pour les autres.
La Forêt : Notre Terrain de Jeu et de Travail
Quand la hache était prête, affûtée jusqu’à pouvoir couper un cheveu, on prenait la direction des grands pins. La forêt, là-bas, c’était comme un vieux sage qui nous observait. On y entrait en silence, les bottes qui craquaient sur le sol givré. Chaque arbre avait sa place, pis c’était comme une sorte de respect qu’on lui donnait en le choisissant pour le couper.
Une fois la cible choisie, on préparait la première entaille, une grosse « encoche » dans le tronc pour orienter la chute. Faut dire que la forêt, c’était notre terrain de jeu, mais aussi notre maître. Chaque coup de hache faisait écho dans les branches, pis les oiseaux s’envolaient, comme pour dire qu’on leur prenait un morceau de chez eux. À chaque arbre qui tombait, y’avait une pause, un respect silencieux pour la bête tombée.
Eh ben, si tu veux retenir quelque chose de ces années-là, c’est bien ça : dans le bois, faut être aussi patient qu’un vieil arbre pis aussi tenace qu’une racine de sapin.
Mémère, la Gardienne du Campement
Pendant qu’on s’occupait des arbres, mémère, elle, gardait la cabane en ordre. C’était elle qui nous préparait les repas, un peu de fèves au lard avec du lard salé, pis un bout de pain. Rien de bien riche, mais ça réchauffait. Quand on rentrait le soir, fatigués et les bras lourds, elle nous attendait avec son fameux ragoût aux pommes de terre pis aux oignons. C’était simple, mais c’était comme un festin après une journée dans le froid.
Les soirées dans la cabane étaient des moments magiques. Autour du poêle, chacun racontait ses histoires. Y’avait toujours un gars pour parler de sa dernière rencontre avec un orignal ou pour nous rappeler qu’il fallait se méfier des ours. Mémère, elle, écoutait en souriant, piquée de ses aiguilles à tricoter, fabriquant des bas de laine pour tout l’monde.
La Veillée : Chants et Histoires au Coin du Feu
Le soir, on faisait pas que raconter des histoires. On chantait aussi. Les gars entonnaient des vieilles chansons du pays, des airs qui sentaient le sapin pis la terre. Mémère en connaissait des tonnes, pis elle chantait fort, sa voix portant plus loin que toutes les autres. C’était des chansons qui parlaient de forêts, de rivières, de l’esprit des bois. Des chansons de drave, des chants pour les âmes perdues dans la neige.
Ces moments-là, mon grand, c’était des instants suspendus, comme si le temps s’arrêtait pour nous écouter. On oubliait le froid, les haches et les douleurs aux mains. Y’avait juste nous, la cabane, le feu qui crépitait, pis l’ombre des grands arbres dehors, silencieux témoins de nos vies de bûcherons.
Le Bois, une Ressource Vivante
Pour nous, le bois, c’était plus qu’une matière première. C’était une ressource vivante, un héritage des ancêtres. Mémère me disait souvent : « L’arbre que tu coupes, c’est celui qui va réchauffer ton foyer. Prends-le avec respect, comme un cadeau de la forêt. » Pis ça, c’était un des plus grands enseignements qu’elle m’a laissés. Prendre le bois sans en abuser, sans le gaspiller. Chaque copeau qui tombait était précieux.
À la cabane, même les plus jeunes apprenaient que le bois, c’était sacré. On n’en jetait pas un bout. Le bois de la coupe était soigneusement empilé près du feu, prêt à être brûlé. On l’utilisait pour chauffer, pour construire, pis même pour cuisiner. Chaque arbre qu’on abattait servait une cause, pis on en était fiers.
La Vie Simple, Mais Riche
La vie en cabane, c’était pas du grand luxe, mais maudit qu’on était heureux. Le simple fait de se retrouver autour d’une bonne soupe chaude, avec les visages rougis par le froid, c’était suffisant pour nous rappeler pourquoi on aimait cette vie. Mémère était là pour veiller sur nous, pour nous rappeler que le vrai bonheur, c’est pas dans l’argent ou les choses matérielles, mais dans ces moments simples, ces histoires qu’on raconte, pis le bois qu’on fend.
En y repensant aujourd’hui, y’a rien de plus beau qu’une journée dans la forêt, avec une hache bien aiguisée, pis le sourire de mémère qui nous attend à la cabane. Elle disait toujours, « La forêt te donne tout, mais respecte-la, pis elle te le rendra cent fois. »
Eh ben, si tu veux retenir quelque chose de ces années-là, c’est bien ça : dans le bois, faut être aussi patient qu’un vieil arbre pis aussi tenace qu’une racine de sapin.